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jeudi 30 juin 2016

Explication de texte du programme de la droite





Le chef de l'État raille
 
«l'inconséquence» et la «brutalité»

des programmes

des candidats de la primaire à 

droite.



«L'originalité n'est pas leur marque de 
fabrique», constate le chef de l'État, pour qui il 
n'y a «aucune» distinction entre les projets.
«La différence» se fait «essentiellement sur 
l'Europe et sur l'identité nationale.

Mais pour le reste, c'est, si je puis dire, un 
fonds commun de mauvais placement».
«À croire que [ces projets] ne sont que la 
reproduction en plus brutal de programmes déjà
 présentés à l'occasion de scrutins 
parfois lointains.

Mais ils me paraissent surtout inadaptés à la 
situation de notre pays et éminemment 
dangereux pour notre modèle social», lâche le 
président de la République, qui pointe 
«beaucoup d'inconséquence et peu de justice».

Avant de cibler quelques propositions émises 
par tous les candidats à droite, comme 
la remise en cause des 35 heures ou
 la modification de l'âge de départ à la retraite

mercredi 29 juin 2016

Une excellente analyse...







PIKETTY et BREXIT



Avouons-le : jusqu’au petit matin du 24 juin 2016, personne ne croyait vraiment que les Britanniques allaient voter pour le « Brexit ».
Maintenant que le désastre est arrivé, il est tentant de se sentir découragé, et d’abandonner tout rêve de refondation démocratique et progressiste de l’Europe. 

Il faut pourtant persévérer et reprendre espoir, car il n’existe pas d’autre option : la montée des égoïsmes nationaux et de la xénophobie en Europe nous conduit tout droit à la catastrophe.


Reprenons le fil des événements, et voyons ce qu’il faudrait changer et clarifier pour reconstruire l’Europe après le Brexit.
Cela a déjà été dit et redit : dans bien des cas, le vote Brexit exprime davantage un vote contre l’immigration et la mondialisation qu’un vote contre l’Union européenne en tant que telle.
Cette attitude de repli xénophobe, que l’on connaît bien en France avec le vote FN, et maintenant aux Etats-Unis avec le vote Trump, même si l’insularité britannique a aussi ses spécificités, a quelque chose de profondément nihiliste et irrationnel : ce n’est pas en stigmatisant toujours plus les travailleurs immigrés et les pays et cultures étrangères que l’on va résoudre les problèmes, bien au contraire.
Et ce n’est évidemment pas en se plaçant en dehors du seul cadre européen existant de délibération collective, aussi imparfait soit-il, que le Royaume-Uni va trouver sa voie.
Renforcement des tendances inégalitaires de la mondialisation
Tout cela est vrai, mais il faut préciser deux points. Tout d’abord, ce vote est également une réaction au fait que les institutions européennes, toutes entières tournées vers le principe d’une concurrence toujours plus pure et plus parfaite entre territoires et entre pays, sans socle social et fiscal commun, n’ont fait objectivement que renforcer les tendances lourdement inégalitaires de la mondialisation à l’œuvre au cours des dernières décennies.
Face à l’absence de réponse démocratique et progressiste, il n’est pas étonnant que les classes populaires et moyennes finissent par se tourner vers les forces xénophobes.
Il s’agit d’une réponse pathologique à un abandon bien réel. Née d’un projet de projet de marché commun adapté à la reconstruction et à la croissance des années 1950-1970, la construction européenne n’a jamais su se transformer en force efficace de régulation du capitalisme mondialisé et financier en plein essor depuis les années 1980-1990.
Ensuite, la vérité oblige à dire que le UKIP ou le FN ne sont pas malheureusement pas les seules forces politiques à avoir succombé à la montée des égoïsmes nationaux et à l’irrationalité collective au cours des dernières années. En particulier, c’est l’égoïsme à courte vue et la montée du « chacun pour soi » qui expliquent la gestion catastrophique de la crise financière par les pays de la zone euro depuis 2008.
Les gouvernements de centre droit et de centre gauche (CDU, UMP, PS) qui se sont succédé au pouvoir des deux côtés du Rhin portent de ce point de vue une écrasante responsabilité historique, qu’il faudra bien reconnaître un jour.
En Allemagne, le discours tenu depuis bientôt dix ans n’a quasiment pas varié d’une virgule : si les autres pays de la zone euro faisaient la même chose que nous, adoptaient les mêmes réformes, se comportaient avec la même fiabilité et la même vertu, etc., alors tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Discours irrationnel
Le problème de ce discours moralisateur, donneur de leçons et nationaliste est qu’il est totalement irrationnel.
Non pas qu’il n’y ait quelques bonnes choses à apprendre dans le modèle industriel et social allemand, évidemment.
Le problème est que si chaque pays de la zone euro avait appliqué la même politique de déflation salariale généralisée, et se retrouvait aujourd’hui avec le même excédent commercial gigantesque de 8 % du PIB, totalement inédit dans l’histoire depuis la révolution industrielle, alors par définition il n’existerait personne au monde pour absorber un tel excédent.
Les responsables allemands se refusent toujours à expliquer à leur opinion cette réalité factuelle, évidente pour le reste du monde et pour l’histoire : à savoir que leur haut niveau d’activité économique et d’emploi a été obtenu pour une bonne part au détriment des voisins.
Avec plusieurs monnaies, il aurait suffi de dévaluer fortement les monnaies du sud de l’Europe ; mais à partir du moment où l’on faisait le choix de conserver la monnaie unique, alors il aurait fallu et il faut toujours relancer massivement les salaires et l’investissement public en Allemagne, et mettre en place une union fiscale et budgétaire.
Quant à la France, qui aime se servir de l’Allemagne comme d’une mauvaise excuse pour ne rien faire, la vérité est que c’est parce qu’elle a bénéficié des mêmes taux d’intérêt ultra faibles que son voisin allemand, qu’elle a choisi de laisser tomber l’Europe du Sud.
Conséquence de tout cela : les responsables de la zone euro ont imposé des politiques d’hyper-austérité qui ont fait replonger la zone dans une récession absurde en 2011-2013, à rebours du reste du monde, et dont on se remet à peine.



Boulet pour l’Europe
C’est ainsi que la zone euro est devenue un boulet pour l’Europe, ce que les tenants du Brexit n’ont pas manqué d’exploiter dans la campagne qui s’achève : à quoi bon rester avec des pays qui nous tirent vers le bas, et qui se sont montrés incapables de gérer correctement leur union monétaire ?
L’euro devait marquer la transformation du marché commun en union politique, capable de nous protéger face à la spéculation des marchés, première étape vers une puissance publique permettant de réguler le capitalisme du XXIe siècle. En réalité, l’euro est devenu la machine infernale qui menace de tout faire dérailler.



Que faire aujourd’hui ?
Il faut tout d’abord clarifier le fait que l’Union européenne ne peut se réduire à une vaste de zone de libre circulation des marchandises, des services et des capitaux, sans aucune contrepartie fiscale, sociale et réglementaire.
Pour être durable, la croissance économique a besoin de services publics, d’infrastructures, de systèmes d’éducation, de recherche, de santé, d’échanges universitaires, de péréquation régionale, d’égalité des chances, et tout cela à un coût.
Le Royaume-Uni va maintenant chercher à obtenir un statut analogue à celui de la Norvège, de l’Islande et de la Suisse.
Il est plus que temps de rappeler aux Britanniques et cela aurait pu changer le cours des choses si cela avait été fait plus tôt par les gouvernements allemands et français, en toute transparence que cela ne se fera pas gratuitement.
La Norvège et l’Islande font partie de l’Espace économique européen (EEE), ce qui leur garantit un accès plein et entier au marché commun.
Mais ces deux pays doivent en contrepartie appliquer la quasi-totalité de la législation de l’Union, et acquitter une contribution à son budget (voisine de la contribution britannique actuelle, si on l’exprime en pourcentage du PIB), tout cela sans participer à la prise de décision collective.
Il faudrait d’ailleurs en profiter pour appliquer les mêmes règles à la Suisse, qui bénéficie actuellement d’un statut privilégié (sa contribution budgétaire est moitié moindre).



Sanctions contre le dumping réglementaire
Surtout, au-delà de la question de la contribution budgétaire permanente des pays non membres de l’Union souhaitant bénéficier du marché commun, il est temps de mettre sur la table la question des sanctions applicables aux pays pratiquant le dumping réglementaire, et en particulier aux pays qui n’appliqueraient pas des règles strictes en matière de transparence financière et de lutte contre l’optimisation fiscale.
Il n’est pas normal que l’on ait dû attendre les sanctions américaines pour que le secret bancaire suisse commence (timidement) à être remis en cause.
Les calculs de Gabriel Zucman (La richesse cachée des nations, Seuil 2014, traduit en de nombreuses langues) montrent que les bénéfices apportés à la Suisse par le secret bancaire sont équivalents à ce que coûterait au pays des droits de douane de l’ordre de 30 % appliqués par ses trois principaux voisins (Allemagne, France, et Italie).
La même question va se poser pour la place financière de Londres et les paradis fiscaux de la couronne britannique.
Il faudra évaluer rigoureusement les dommages imposés aux autres, et appliquer des sanctions en rapport avec ces montants.
Bénéficier du marché commun tout en siphonnant la base fiscale des voisins
Tant que l’on n’est pas prêt à imposer des sanctions de ce type, alors il ne faudra pas s’étonner que des pays choisissent de prospérer en dehors de l’Union européenne : s’il est possible de bénéficier du marché commun, tout en siphonnant tranquillement la base fiscale des voisins, pourquoi se priver ?
Le système légal et politique dans lequel s’est enferrée l’Europe, qui repose in fine sur une sacralisation de la libre circulation et du marché libre, sans contrepartie sérieuse en termes de régulation collective, nous conduit tout droit à des « Brexit » en série.
Ensuite, si l’on souhaite sauver la zone euro, il va falloir fondamentalement changer son cours.
Après la victoire électorale de Syriza en Grèce en janvier 2015 (elle-même conséquence du refus obstiné des Européens d’engager la restructuration de dette pourtant promise au précédent gouvernement grec), les dirigeants de la zone euro ont fait le choix absurde de vouloir humilier le pays, afin d’éviter que d’autres électeurs ne soient tentés par l’aventure.
Ce choix a en partie payé, puisque Podemos n’a pu faire mieux que jeu égal avec le PSOE lors des doubles élections espagnoles de décembre 2015 et juin 2016.
Sauf que l’Espagne est aujourd’hui ingouvernable, et que les dirigeants français et allemands se retrouvent maintenant confrontés un peu partout avec la montée du populisme de droite et du nationalisme, au Royaume-Uni comme en Pologne et en Hongrie.
Cette menace est autrement plus dangereuse pour l’Europe que le défi posé par la gauche radicale, qui dans le fond ne fait que formuler une demande de bon sens : la restructuration des dettes publiques européennes est inévitable et doit être organisée au plus vite.
Il aurait mieux fallu tenter de s’appuyer sur Syriza, Podemos, le PSOE et l’ensemble des partis de gauche radicale ou non, qui ont le mérite d’être fondamentalement proeuropéens, par comparaison aux populistes de droite.
Il est navrant de constater qu’aujourd’hui encore, les dirigeants européens continuent d’exiger de la Grèce qu’elle dégage un excédent primaire de 3,5 % du PIB pour les décennies qui viennent, tout cela dans un pays dont le niveau d’activité économique est un quart un plus faible qu’en 2008, et où le chômage a explosé, ce qui n’a strictement aucun sens.
Il est normal de demander à un pays un léger excédent, de l’ordre de 0,5 % ou 1 % du PIB, mais pas davantage.
La décision vient de nouveau été repoussée à la fin de l’année, et il y a fort à parier que ce ne soit pas la dernière fois.



Moratoire sur les dettes européennes
Plus généralement, il est urgent de mettre en place un moratoire sur les dettes européennes, tant que la zone n’aura pas retrouvé une croissance robuste, et de lancer un programme d’investissement dans les infrastructures, la formation et la recherche. Le secteur privé a aujourd’hui peur d’investir, comme le montrent les taux d’intérêt négatifs actuellement appliqués, et sans relance publique il existe un risque réel que la zone euro s’éternise dans un régime de croissance molle et d’inflation quasi-nulle, voire négative.
L’histoire démontre qu’il est impossible de réduire un endettement public élevé dans de telles conditions, et qu’il vaut mieux avoir le courage de restructurer clairement les dettes lorsqu’elles deviennent impossibles à rembourser pour les nouvelles générations (ce dont a d’ailleurs bénéficié fortement l’Allemagne lors de l’annulation de sa dette dans les années 1950).
La création monétaire et le développement de nouvelles bulles sur les prix des actifs ne résoudront pas le problème à la place des gouvernements, bien au contraire.
Enfin, si l’on souhaite véritablement avancer sur toutes ces questions, alors le débat institutionnel ne pourra être évité. On peut toujours bricoler des compromis dans l’urgence à partir des institutions actuelles.
Mais à terme, si l’on souhaite pouvoir adopter démocratiquement et sereinement un plan de relance au sein de la zone euro, une restructuration des dettes, un impôt commun sur les bénéfices des sociétés, etc., alors une refondation démocratique s’impose.
Il existe une théorie selon laquelle les institutions européennes auraient atteint une sorte de perfection indépassable avec le traité constitutionnel européen de 2005 (finalement adopté en 2008 avec le traité de Lisbonne), et que tout irait pour le mieux si les responsables politiques nationaux et les opinions publiques se saisissaient enfin de ces institutions merveilleuses et cessaient d’être stupidement europhobes.






Bicaméralisme de façade et machine à faire détester l’Europe
En vérité, les institutions européennes actuelles sont gravement dysfonctionnelles.
Elles reposent sur un bicaméralisme de façade : d’un côté, le Conseil européen des chefs d’Etats (et ses déclinaisons au niveau ministériel : Conseil des ministres des finances, Conseil des ministres de l’agriculture, etc.) ; de l’autre, le Parlement européen (élu directement par les citoyens).
En principe, les textes législatifs européens doivent être approuvés par ces deux chambres.
En pratique, l’essentiel du pouvoir est détenu par le Conseil européen et les Conseils ministériels, qui le plus souvent doivent statuer à la règle de l’unanimité (notamment sur la fiscalité, ce qui empêche toute avancée réelle), et qui, dans les rares cas où s’applique la règle de la majorité, continuent toujours de délibérer à huis clos.
En vérité, le Conseil européen est une machine à dresser les intérêts nationaux les uns contre les autres, une machine à empêcher toute possibilité de faire émerger des délibérations démocratiques et des décisions majoritaires au niveau européen.
A partir du moment où vous demandez à une personne (chef d’Etat ou ministre des finances) de représenter à elle seule 82 millions d’Allemands ou 65 millions de Français, ou encore 11 millions de Grecs, il est impossible d’avoir une délibération démocratique apaisée aboutissant à la mise en minorité de l’une ou l’autre de ces personnes.
C’est ce système institutionnel, doublé de multiples règles visant à contourner la démocratie (unanimité sur la fiscalité, règles automatiques sur les critères budgétaires), qui produit l’inertie et l’incapacité d’agir en Europe.
Chacun défend ce qu’il croit être ses intérêts nationaux, et en vérité personne n’en sait rien, puisque tout cela se passe à huis clos.
Ces Conseils européens nous annoncent régulièrement au milieu de la nuit qu’ils ont sauvé l’Europe, avant que l’on ne se rende compte dans la journée qui suit qu’ils ne savent pas eux-mêmes ce qu’ils ont décidé. Cette structure institutionnelle est une machine à faire détester l’Europe.



Evolutions possibles
Face à ce blocage, plusieurs évolutions sont possibles.
Certains europhiles proposent de réduire drastiquement le rôle du Conseil européen et de confier l’essentiel du pouvoir au Parlement européen (voir par exemple Laurent Joffrin il y a quelques jours dans Libération).
Cette solution a le mérite de la simplicité.
Mais elle a l’inconvénient de faire totalement l’impasse sur les institutions politiques nationales, ce qui risque fort de provoquer l’hostilité de ces dernières et les « Brexit » en cascade.
Il me semble plus prometteur d’imaginer une forme originale de bicaméralisme européen, fondée d’une part sur le Parlement européen (élu directement par les citoyens), et d’autre part sur une chambre parlementaire composée de représentants des Parlements nationaux, en proportion de la population de chaque pays et des groupes politiques présents dans chaque Parlement.
Cette chambre parlementaire comporterait par exemple une quarantaine de membres du Bundestag, une trentaine de membres de l’Assemblée nationale, etc., et se réunirait environ une semaine par mois, pour trancher notamment les décisions budgétaires et financières engageant directement les contribuables nationaux : choix du niveau de déficit budgétaire au sein de la zone euro, supervision du Mécanisme européen de stabilité, budget de la zone euro, restructuration des dettes, etc.
On peut imaginer pour cela différentes règles de majorité qualifiée, qui dans tous les cas seraient plus satisfaisantes que la situation actuelle, où chaque Parlement national dispose de facto d’un droit de veto, ce qui pose de redoutables problèmes de légitimité démocratique (Bundestag contre Parlement grec, etc.) et conduit le plus souvent au blocage.
En donnant la possibilité aux députés nationaux de siéger les uns aux côtés des autres et de prendre des décisions majoritaires, à l’issue de délibérations publiques et démocratiques, on peut au moins espérer faire des progrès dans la bonne direction.



Démocratie parlementaire
Cette forme originale de bicaméralisme diffère des structures classiques de bicaméralisme (Assemblée/Sénat en France, Bundestag/Bundesrat en Allemagne, Chambre/Sénat aux Etats-Unis) et correspond, me semble-t-il, au caractère unique de la construction européenne, qui s’appuie sur de vieux Etats-nations qui ont réussi à construire au fil des décennies des formes extrêmement élaborées d’Etat social, en s’appuyant sur la démocratie parlementaire dans le cadre national.
Il ne me semble ni réaliste ni souhaitable de prétendre bâtir une souveraineté parlementaire européenne en contournant les Parlements nationaux, qui malgré tous leurs défauts, demeurent les structures démocratiques essentielles qui ont permis depuis des décennies de voter des prélèvements et des budgets sociaux représentant des dizaines de points de PIB, avec à la clé, une progression du bien-être social et une amélioration des conditions de vie inédites dans l’histoire du monde.
Il paraît plus judicieux de transformer progressivement les législateurs nationaux en co-législateurs européens, en les contraignant à prendre en compte l’intérêt général européen, et en les empêchant de se contenter de se plaindre de l’Europe.
Le débat est ouvert, et il mérite des discussions approfondies.
Il faut également éviter qu’il s’arrête trop vite sur des malentendus.
Trop souvent, lorsque l’on évoque cette question du rôle des Parlements nationaux, on entend les réactions énervées des europhiles, et notamment des proches du Parlement européen, qui voient de telles propositions comme un insupportable retour en arrière.



Un véritable pouvoir législatif en lieu et place du Conseil Européen
De fait, avant la première élection au suffrage universel du Parlement européen, en 1979, ce dernier n’était qu’une Assemblée parlementaire composée de représentants des parlements nationaux, avec un rôle purement consultatif.
Mais la proposition défendue ici est totalement différente : il s’agit de donner à cette chambre parlementaire issue des Parlements nationaux un véritable pouvoir législatif, en lieu et place du Conseil européen (qui ne sera jamais une véritable chambre législative).
Ce qui, dans le fond, permettrait de renforcer la logique parlementaire défendue par le Parlement européen, et constitue sans doute la seule façon de dépasser les blocages actuels.
Mais les vieux démons ont la vie dure, et il est à craindre que ces réactions ne disparaîtront pas de sitôt.
Il y a quelques jours, Jean-Pierre Chevènement, éternel défenseur de l’Europe des nations, proposait dans Le Monde de renforcer le pouvoir du Conseil européen (qui est pourtant tout sauf un lieu de délibération démocratique), tout en suggérant que le Parlement européen soit issu des Parlements nationaux (ce qui ne manquera pas d’agacer les euro-parlementaires), sans toutefois préciser sous quelle forme et avec quels pouvoirs.
Certains membres du Parlement européen, comme par exemple Yannick Jadot ou Henri Weber, proposent une solution mixte, avec un Parlement de la zone euro, composé pour partie de parlementaires européens et nationaux. Cela ne me semble pas être la solution la plus lisible, mais le débat est légitime.
En tout état de cause, ce débat sur les institutions européennes est fondamental, et il ne doit pas être réservé aux experts du droit et des constitutions : il concerne tous les citoyens, de même que les débats sur l’impôt ou sur la dette.
Ces questions ont trop longtemps été abandonnées à d’autres, avec les résultats que l’on sait. Il est temps que les citoyens de l’Europe se réapproprient l’avenir.




PIKETTY et BREXIT



Avouons-le : jusqu’au petit matin du 24 juin 

2016, personne ne croyait vraiment que les 

Britanniques allaient voter pour le « Brexit ».

Maintenant que le désastre est arrivé, il est 

tentant de se sentir découragé, et 

d’abandonner 

tout rêve de refondation démocratique et 

progressiste de l’Europe. Il faut pourtant 

persévérer et reprendre espoir, car il n’existe 

pas d’autre option : la montée des égoïsmes 

nationaux et de la xénophobie en Europe nous 

conduit tout droit à la catastrophe.


Reprenons le fil des événements, et voyons ce qu’il faudrait changer et clarifier pour reconstruire l’Europe après le Brexit.
Cela a déjà été dit et redit : dans bien des cas, le vote Brexit exprime davantage un vote contre l’immigration et la mondialisation qu’un vote contre l’Union européenne en tant que telle.
Cette attitude de repli xénophobe, que l’on connaît bien en France avec le vote FN, et maintenant aux Etats-Unis avec le vote Trump, même si l’insularité britannique a aussi ses spécificités, a quelque chose de profondément nihiliste et irrationnel : ce n’est pas en stigmatisant toujours plus les travailleurs immigrés et les pays et cultures étrangères que l’on va résoudre les problèmes, bien au contraire.
Et ce n’est évidemment pas en se plaçant en dehors du seul cadre européen existant de délibération collective, aussi imparfait soit-il, que le Royaume-Uni va trouver sa voie.
Renforcement des tendances inégalitaires de la mondialisation
Tout cela est vrai, mais il faut préciser deux points. Tout d’abord, ce vote est également une réaction au fait que les institutions européennes, toutes entières tournées vers le principe d’une concurrence toujours plus pure et plus parfaite entre territoires et entre pays, sans socle social et fiscal commun, n’ont fait objectivement que renforcer les tendances lourdement inégalitaires de la mondialisation à l’œuvre au cours des dernières décennies.
Face à l’absence de réponse démocratique et progressiste, il n’est pas étonnant que les classes populaires et moyennes finissent par se tourner vers les forces xénophobes.
Il s’agit d’une réponse pathologique à un abandon bien réel. Née d’un projet de projet de marché commun adapté à la reconstruction et à la croissance des années 1950-1970, la construction européenne n’a jamais su se transformer en force efficace de régulation du capitalisme mondialisé et financier en plein essor depuis les années 1980-1990.
Ensuite, la vérité oblige à dire que le UKIP ou le FN ne sont pas malheureusement pas les seules forces politiques à avoir succombé à la montée des égoïsmes nationaux et à l’irrationalité collective au cours des dernières années. En particulier, c’est l’égoïsme à courte vue et la montée du « chacun pour soi » qui expliquent la gestion catastrophique de la crise financière par les pays de la zone euro depuis 2008.
Les gouvernements de centre droit et de centre gauche (CDU, UMP, PS) qui se sont succédé au pouvoir des deux côtés du Rhin portent de ce point de vue une écrasante responsabilité historique, qu’il faudra bien reconnaître un jour.
En Allemagne, le discours tenu depuis bientôt dix ans n’a quasiment pas varié d’une virgule : si les autres pays de la zone euro faisaient la même chose que nous, adoptaient les mêmes réformes, se comportaient avec la même fiabilité et la même vertu, etc., alors tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Discours irrationnel
Le problème de ce discours moralisateur, donneur de leçons et nationaliste est qu’il est totalement irrationnel.
Non pas qu’il n’y ait quelques bonnes choses à apprendre dans le modèle industriel et social allemand, évidemment.
Le problème est que si chaque pays de la zone euro avait appliqué la même politique de déflation salariale généralisée, et se retrouvait aujourd’hui avec le même excédent commercial gigantesque de 8 % du PIB, totalement inédit dans l’histoire depuis la révolution industrielle, alors par définition il n’existerait personne au monde pour absorber un tel excédent.
Les responsables allemands se refusent toujours à expliquer à leur opinion cette réalité factuelle, évidente pour le reste du monde et pour l’histoire : à savoir que leur haut niveau d’activité économique et d’emploi a été obtenu pour une bonne part au détriment des voisins.
Avec plusieurs monnaies, il aurait suffi de dévaluer fortement les monnaies du sud de l’Europe ; mais à partir du moment où l’on faisait le choix de conserver la monnaie unique, alors il aurait fallu et il faut toujours relancer massivement les salaires et l’investissement public en Allemagne, et mettre en place une union fiscale et budgétaire.
Quant à la France, qui aime se servir de l’Allemagne comme d’une mauvaise excuse pour ne rien faire, la vérité est que c’est parce qu’elle a bénéficié des mêmes taux d’intérêt ultra faibles que son voisin allemand, qu’elle a choisi de laisser tomber l’Europe du Sud.
Conséquence de tout cela : les responsables de la zone euro ont imposé des politiques d’hyper-austérité qui ont fait replonger la zone dans une récession absurde en 2011-2013, à rebours du reste du monde, et dont on se remet à peine.



Boulet pour l’Europe
C’est ainsi que la zone euro est devenue un boulet pour l’Europe, ce que les tenants du Brexit n’ont pas manqué d’exploiter dans la campagne qui s’achève : à quoi bon rester avec des pays qui nous tirent vers le bas, et qui se sont montrés incapables de gérer correctement leur union monétaire ?
L’euro devait marquer la transformation du marché commun en union politique, capable de nous protéger face à la spéculation des marchés, première étape vers une puissance publique permettant de réguler le capitalisme du XXIe siècle. En réalité, l’euro est devenu la machine infernale qui menace de tout faire dérailler.



Que faire aujourd’hui ?
Il faut tout d’abord clarifier le fait que l’Union européenne ne peut se réduire à une vaste de zone de libre circulation des marchandises, des services et des capitaux, sans aucune contrepartie fiscale, sociale et réglementaire.
Pour être durable, la croissance économique a besoin de services publics, d’infrastructures, de systèmes d’éducation, de recherche, de santé, d’échanges universitaires, de péréquation régionale, d’égalité des chances, et tout cela à un coût.
Le Royaume-Uni va maintenant chercher à obtenir un statut analogue à celui de la Norvège, de l’Islande et de la Suisse.
Il est plus que temps de rappeler aux Britanniques et cela aurait pu changer le cours des choses si cela avait été fait plus tôt par les gouvernements allemands et français, en toute transparence que cela ne se fera pas gratuitement.
La Norvège et l’Islande font partie de l’Espace économique européen (EEE), ce qui leur garantit un accès plein et entier au marché commun.
Mais ces deux pays doivent en contrepartie appliquer la quasi-totalité de la législation de l’Union, et acquitter une contribution à son budget (voisine de la contribution britannique actuelle, si on l’exprime en pourcentage du PIB), tout cela sans participer à la prise de décision collective.
Il faudrait d’ailleurs en profiter pour appliquer les mêmes règles à la Suisse, qui bénéficie actuellement d’un statut privilégié (sa contribution budgétaire est moitié moindre).



Sanctions contre le dumping réglementaire
Surtout, au-delà de la question de la contribution budgétaire permanente des pays non membres de l’Union souhaitant bénéficier du marché commun, il est temps de mettre sur la table la question des sanctions applicables aux pays pratiquant le dumping réglementaire, et en particulier aux pays qui n’appliqueraient pas des règles strictes en matière de transparence financière et de lutte contre l’optimisation fiscale.
Il n’est pas normal que l’on ait dû attendre les sanctions américaines pour que le secret bancaire suisse commence (timidement) à être remis en cause.
Les calculs de Gabriel Zucman (La richesse cachée des nations, Seuil 2014, traduit en de nombreuses langues) montrent que les bénéfices apportés à la Suisse par le secret bancaire sont équivalents à ce que coûterait au pays des droits de douane de l’ordre de 30 % appliqués par ses trois principaux voisins (Allemagne, France, et Italie).
La même question va se poser pour la place financière de Londres et les paradis fiscaux de la couronne britannique.
Il faudra évaluer rigoureusement les dommages imposés aux autres, et appliquer des sanctions en rapport avec ces montants.
Bénéficier du marché commun tout en siphonnant la base fiscale des voisins
Tant que l’on n’est pas prêt à imposer des sanctions de ce type, alors il ne faudra pas s’étonner que des pays choisissent de prospérer en dehors de l’Union européenne : s’il est possible de bénéficier du marché commun, tout en siphonnant tranquillement la base fiscale des voisins, pourquoi se priver ?
Le système légal et politique dans lequel s’est enferrée l’Europe, qui repose in fine sur une sacralisation de la libre circulation et du marché libre, sans contrepartie sérieuse en termes de régulation collective, nous conduit tout droit à des « Brexit » en série.
Ensuite, si l’on souhaite sauver la zone euro, il va falloir fondamentalement changer son cours.
Après la victoire électorale de Syriza en Grèce en janvier 2015 (elle-même conséquence du refus obstiné des Européens d’engager la restructuration de dette pourtant promise au précédent gouvernement grec), les dirigeants de la zone euro ont fait le choix absurde de vouloir humilier le pays, afin d’éviter que d’autres électeurs ne soient tentés par l’aventure.
Ce choix a en partie payé, puisque Podemos n’a pu faire mieux que jeu égal avec le PSOE lors des doubles élections espagnoles de décembre 2015 et juin 2016.
Sauf que l’Espagne est aujourd’hui ingouvernable, et que les dirigeants français et allemands se retrouvent maintenant confrontés un peu partout avec la montée du populisme de droite et du nationalisme, au Royaume-Uni comme en Pologne et en Hongrie.
Cette menace est autrement plus dangereuse pour l’Europe que le défi posé par la gauche radicale, qui dans le fond ne fait que formuler une demande de bon sens : la restructuration des dettes publiques européennes est inévitable et doit être organisée au plus vite.
Il aurait mieux fallu tenter de s’appuyer sur Syriza, Podemos, le PSOE et l’ensemble des partis de gauche radicale ou non, qui ont le mérite d’être fondamentalement proeuropéens, par comparaison aux populistes de droite.
Il est navrant de constater qu’aujourd’hui encore, les dirigeants européens continuent d’exiger de la Grèce qu’elle dégage un excédent primaire de 3,5 % du PIB pour les décennies qui viennent, tout cela dans un pays dont le niveau d’activité économique est un quart un plus faible qu’en 2008, et où le chômage a explosé, ce qui n’a strictement aucun sens.
Il est normal de demander à un pays un léger excédent, de l’ordre de 0,5 % ou 1 % du PIB, mais pas davantage.
La décision vient de nouveau été repoussée à la fin de l’année, et il y a fort à parier que ce ne soit pas la dernière fois.



Moratoire sur les dettes européennes
Plus généralement, il est urgent de mettre en place un moratoire sur les dettes européennes, tant que la zone n’aura pas retrouvé une croissance robuste, et de lancer un programme d’investissement dans les infrastructures, la formation et la recherche. Le secteur privé a aujourd’hui peur d’investir, comme le montrent les taux d’intérêt négatifs actuellement appliqués, et sans relance publique il existe un risque réel que la zone euro s’éternise dans un régime de croissance molle et d’inflation quasi-nulle, voire négative.
L’histoire démontre qu’il est impossible de réduire un endettement public élevé dans de telles conditions, et qu’il vaut mieux avoir le courage de restructurer clairement les dettes lorsqu’elles deviennent impossibles à rembourser pour les nouvelles générations (ce dont a d’ailleurs bénéficié fortement l’Allemagne lors de l’annulation de sa dette dans les années 1950).
La création monétaire et le développement de nouvelles bulles sur les prix des actifs ne résoudront pas le problème à la place des gouvernements, bien au contraire.
Enfin, si l’on souhaite véritablement avancer sur toutes ces questions, alors le débat institutionnel ne pourra être évité. On peut toujours bricoler des compromis dans l’urgence à partir des institutions actuelles.
Mais à terme, si l’on souhaite pouvoir adopter démocratiquement et sereinement un plan de relance au sein de la zone euro, une restructuration des dettes, un impôt commun sur les bénéfices des sociétés, etc., alors une refondation démocratique s’impose.
Il existe une théorie selon laquelle les institutions européennes auraient atteint une sorte de perfection indépassable avec le traité constitutionnel européen de 2005 (finalement adopté en 2008 avec le traité de Lisbonne), et que tout irait pour le mieux si les responsables politiques nationaux et les opinions publiques se saisissaient enfin de ces institutions merveilleuses et cessaient d’être stupidement europhobes.






Bicaméralisme de façade et machine à faire détester l’Europe
En vérité, les institutions européennes actuelles sont gravement dysfonctionnelles.
Elles reposent sur un bicaméralisme de façade : d’un côté, le Conseil européen des chefs d’Etats (et ses déclinaisons au niveau ministériel : Conseil des ministres des finances, Conseil des ministres de l’agriculture, etc.) ; de l’autre, le Parlement européen (élu directement par les citoyens).
En principe, les textes législatifs européens doivent être approuvés par ces deux chambres.
En pratique, l’essentiel du pouvoir est détenu par le Conseil européen et les Conseils ministériels, qui le plus souvent doivent statuer à la règle de l’unanimité (notamment sur la fiscalité, ce qui empêche toute avancée réelle), et qui, dans les rares cas où s’applique la règle de la majorité, continuent toujours de délibérer à huis clos.
En vérité, le Conseil européen est une machine à dresser les intérêts nationaux les uns contre les autres, une machine à empêcher toute possibilité de faire émerger des délibérations démocratiques et des décisions majoritaires au niveau européen.
A partir du moment où vous demandez à une personne (chef d’Etat ou ministre des finances) de représenter à elle seule 82 millions d’Allemands ou 65 millions de Français, ou encore 11 millions de Grecs, il est impossible d’avoir une délibération démocratique apaisée aboutissant à la mise en minorité de l’une ou l’autre de ces personnes.
C’est ce système institutionnel, doublé de multiples règles visant à contourner la démocratie (unanimité sur la fiscalité, règles automatiques sur les critères budgétaires), qui produit l’inertie et l’incapacité d’agir en Europe.
Chacun défend ce qu’il croit être ses intérêts nationaux, et en vérité personne n’en sait rien, puisque tout cela se passe à huis clos.
Ces Conseils européens nous annoncent régulièrement au milieu de la nuit qu’ils ont sauvé l’Europe, avant que l’on ne se rende compte dans la journée qui suit qu’ils ne savent pas eux-mêmes ce qu’ils ont décidé. Cette structure institutionnelle est une machine à faire détester l’Europe.



Evolutions possibles
Face à ce blocage, plusieurs évolutions sont possibles.
Certains europhiles proposent de réduire drastiquement le rôle du Conseil européen et de confier l’essentiel du pouvoir au Parlement européen (voir par exemple Laurent Joffrin il y a quelques jours dans Libération).
Cette solution a le mérite de la simplicité.
Mais elle a l’inconvénient de faire totalement l’impasse sur les institutions politiques nationales, ce qui risque fort de provoquer l’hostilité de ces dernières et les « Brexit » en cascade.
Il me semble plus prometteur d’imaginer une forme originale de bicaméralisme européen, fondée d’une part sur le Parlement européen (élu directement par les citoyens), et d’autre part sur une chambre parlementaire composée de représentants des Parlements nationaux, en proportion de la population de chaque pays et des groupes politiques présents dans chaque Parlement.
Cette chambre parlementaire comporterait par exemple une quarantaine de membres du Bundestag, une trentaine de membres de l’Assemblée nationale, etc., et se réunirait environ une semaine par mois, pour trancher notamment les décisions budgétaires et financières engageant directement les contribuables nationaux : choix du niveau de déficit budgétaire au sein de la zone euro, supervision du Mécanisme européen de stabilité, budget de la zone euro, restructuration des dettes, etc.
On peut imaginer pour cela différentes règles de majorité qualifiée, qui dans tous les cas seraient plus satisfaisantes que la situation actuelle, où chaque Parlement national dispose de facto d’un droit de veto, ce qui pose de redoutables problèmes de légitimité démocratique (Bundestag contre Parlement grec, etc.) et conduit le plus souvent au blocage.
En donnant la possibilité aux députés nationaux de siéger les uns aux côtés des autres et de prendre des décisions majoritaires, à l’issue de délibérations publiques et démocratiques, on peut au moins espérer faire des progrès dans la bonne direction.



Démocratie parlementaire
Cette forme originale de bicaméralisme diffère des structures classiques de bicaméralisme (Assemblée/Sénat en France, Bundestag/Bundesrat en Allemagne, Chambre/Sénat aux Etats-Unis) et correspond, me semble-t-il, au caractère unique de la construction européenne, qui s’appuie sur de vieux Etats-nations qui ont réussi à construire au fil des décennies des formes extrêmement élaborées d’Etat social, en s’appuyant sur la démocratie parlementaire dans le cadre national.
Il ne me semble ni réaliste ni souhaitable de prétendre bâtir une souveraineté parlementaire européenne en contournant les Parlements nationaux, qui malgré tous leurs défauts, demeurent les structures démocratiques essentielles qui ont permis depuis des décennies de voter des prélèvements et des budgets sociaux représentant des dizaines de points de PIB, avec à la clé, une progression du bien-être social et une amélioration des conditions de vie inédites dans l’histoire du monde.
Il paraît plus judicieux de transformer progressivement les législateurs nationaux en co-législateurs européens, en les contraignant à prendre en compte l’intérêt général européen, et en les empêchant de se contenter de se plaindre de l’Europe.
Le débat est ouvert, et il mérite des discussions approfondies.
Il faut également éviter qu’il s’arrête trop vite sur des malentendus.
Trop souvent, lorsque l’on évoque cette question du rôle des Parlements nationaux, on entend les réactions énervées des europhiles, et notamment des proches du Parlement européen, qui voient de telles propositions comme un insupportable retour en arrière.



Un véritable pouvoir législatif en lieu et place du Conseil Européen
De fait, avant la première élection au suffrage universel du Parlement européen, en 1979, ce dernier n’était qu’une Assemblée parlementaire composée de représentants des parlements nationaux, avec un rôle purement consultatif.
Mais la proposition défendue ici est totalement différente : il s’agit de donner à cette chambre parlementaire issue des Parlements nationaux un véritable pouvoir législatif, en lieu et place du Conseil européen (qui ne sera jamais une véritable chambre législative).
Ce qui, dans le fond, permettrait de renforcer la logique parlementaire défendue par le Parlement européen, et constitue sans doute la seule façon de dépasser les blocages actuels.
Mais les vieux démons ont la vie dure, et il est à craindre que ces réactions ne disparaîtront pas de sitôt.
Il y a quelques jours, Jean-Pierre Chevènement, éternel défenseur de l’Europe des nations, proposait dans Le Monde de renforcer le pouvoir du Conseil européen (qui est pourtant tout sauf un lieu de délibération démocratique), tout en suggérant que le Parlement européen soit issu des Parlements nationaux (ce qui ne manquera pas d’agacer les euro-parlementaires), sans toutefois préciser sous quelle forme et avec quels pouvoirs.
Certains membres du Parlement européen, comme par exemple Yannick Jadot ou Henri Weber, proposent une solution mixte, avec un Parlement de la zone euro, composé pour partie de parlementaires européens et nationaux. Cela ne me semble pas être la solution la plus lisible, mais le débat est légitime.
En tout état de cause, ce débat sur les institutions européennes est fondamental, et il ne doit pas être réservé aux experts du droit et des constitutions : il concerne tous les citoyens, de même que les débats sur l’impôt ou sur la dette.
Ces questions ont trop longtemps été abandonnées à d’autres, avec les résultats que l’on sait. Il est temps que les citoyens de l’Europe se réapproprient l’avenir.

dimanche 26 juin 2016

BREXIT (suite)



D'EuropaNova


"Nous respectons le vote des citoyens britanniques, et nous le regrettons.


Mais il est crucial de ne pas laisser le Brexit détourner notre énergie.
Tout au contraire, il peut et doit servir à la raviver.
Les Européens doivent se réinventer, et relever des défis collectifs considérables.
Le moment est venu de relancer l’Appel publié simultanément le 9 mai dernier dans une dizaine de pays européens à l’initiative de personnalités très diverses de la société civile, de la culture et de la politique.
Ce texte propose 'une feuille de route pour une Nouvelle Renaissance européenne', applicable dès l’automne prochain et axée autour de six initiatives concrètes :



1. Un renforcement de la démocratie et de la culture civique européenne ;
2. Une nouvelle étape en matière de sécurité, de défense et de protection civile des citoyens européens ;
3. Une stratégie pour accueillir, intégrer et, le cas échéant, préparer les conditions de retour à plus long terme des réfugiés dans leur pays ;
4. Une nouvelle politique industrielle européenne, fondée sur une croissance décarbonée, capable de moderniser notre économie et de créer massivement des emplois de proximité ;
5. L’achèvement de la zone euro, pour qu’elle fonctionne efficacement, et non comme une machine à accroitre les inégalités ;
6. La création d’un Erasmus des collégiens, qui rassemblera tous les jeunes d’une même génération.

"Une réappropriation rapide du projet européen par nos concitoyens"

Le retentissement de cet appel a été considérable.
Des citoyens nous ont apporté leur soutien, des parlementaires y voient une base de relance de l’Union, des organisations de la société civile en font le cœur de leur réflexion, des chefs d’Etat et de gouvernement, dont le président de la République française, nous ont invités à les rencontrer.
Notre ambition est de contribuer à une réappropriation rapide du projet européen par nos concitoyens, dans l’intérêt général de tous.
Nous dessinons ainsi notre futur commun.
La feuille de route est ambitieuse, concrète, réaliste, centrée sur les besoins et les préoccupations des citoyens.
Sans sa mise en œuvre rapide, le décrochage entre les institutions européennes et les Européens va s’accélérer, premier pas vers une possible implosion de l’Union.
Une régression sans précédent menace nos démocraties."

"Donnons à

l'UNION EUROPEENNE

les compétences pour

améliorer durablement nos vies"




Dans ce monde traversé par des défis 
géopolitiques, sécuritaires, migratoires, 
climatiques ou économiques transnationaux, 
une Europe unie et puissante est plus 
nécessaire que jamais.


Respectueuse des diversités nationales, garante des droits fondamentaux, capable d’intégrer les immigrants, de créer des emplois, de réduire les inégalités et d’influencer le cours du monde, l’Union Européenne doit devenir une grande puissance démocratique, culturelle, écologique et économique, dans un monde multipolaire où les Européens ne représenteront bientôt plus que 5% de la population totale.
C’est la condition pour que nos concitoyens reprennent confiance en l’avenir.
Voilà dix ans que les opposants au projet européen saturent l’espace public.
Ils critiquent pêle-mêle l’inaction de l’Europe en matière de sécurité, de politique étrangère ou de défense, alors que c’est eux-mêmes qui lui ont refusé les moyens d’agir.
Rompons ce cycle absurde!
Donnons à l’Union les compétences pour améliorer durablement nos vies.
«Pour que notre ambition se concrétise, nous avons besoin que vous, citoyens de nos pays de l’Union»
Six initiatives, six urgences.
Au-delà, nous voulons aussi des institutions européennes plus efficaces.
Que le Parlement européen prenne, au bon moment, l’initiative d’une convention ouverte et transparente, et engage le débat avec la société civile.
Il faut adapter les traités aux enjeux de notre temps.
Nous aboutirons ainsi à un nouveau traité, qui permettra aux pays qui le souhaitent d’avancer ensemble.
Pour que notre ambition se concrétise, nous avons besoin que vous, citoyens de nos pays de l’Union, vous vous empariez de notre initiative : débattez, contredisez ou complétez nos propositions.
L’Union européenne doit redevenir l’affaire de tous, et non l’affaire de ceux qui veulent la détruire.
Seul un tel mouvement citoyen donnera à nos gouvernants le courage d’agir.
Nous invitons tous ceux qui partagent cette conviction à nous rejoindre.
Commençons ensemble un grand dialogue européen sur ce que nous attendons de l’Union européenne, pour qu’elle puisse profiter à nous tous, maintenant!"



Les co-auteurs de la Feuille de route pour une Nouvelle Renaissance européenne sont :

Guillaume Klossa (FR), auteur, initiateur de la feuille de route, fondateur d’EuropaNova, ancien sherpa du groupe de réflexion sur l’avenir de l’Europe (Conseil européen) László Andor (HU), économiste, ancien commissaire européen Lionel Baier (CH), réalisateur Michel Barnier (FR), ancien ministre des Affaires étrangères, ancien vice-président de la Commission européenne, Parti Populaire européen Mercedes Bresso (IT), parlementaire européenne, ancienne présidente du Comité des Régions Elmar Brok (DE), président de la Commission des Affaires étrangères, Parti Populaire européen Parlement européen Daniel Cohn-Bendit (FR-DE), ancien président du groupe "Les Verts", Parlement européen Philippe de Buck (BE), ancien directeur général de BusinessEurope, membre du Comité économique et social européen Georgios Dassis (GR), syndicaliste, président du Comité économique et social européen Paul Dujardin (BE), directeur général du Palais des Beaux-arts (BOZAR) de Bruxelles Joschka Fischer(DE), ancien Ministre des affaires étrangères et vice-chancellier d’Allemagne Cynthia Fleury (FR), philosophe Felipe Gonzalez (ES), ancien premier ministre, ancien président du groupe de réflexion sur l’avenir de l’Europe (Conseil européen) Danuta Huebner (PL), ancienne commissaire européenne, présidente de la commission des affaires constitutionnelles, Parti Populaire Européen, Parlement Européen Catiuscia Marini (IT), Présidente du groupe socialiste au Comité des Régions, Présidente de la région d’Ombrie Robert Menasse (AT), écrivain Christophe Leclerq (FR), entrepreneur dans le monde des média et fondateur d’EurActiv Jo Leinen (DE), président du Mouvement européen, député, Parlement européen Sofi Oksanen (FI), écrivaine Maria João Rodrigues (PT), membre d’équipes de présidence européenne, ancienne ministre, vice-présidente du groupe "Socialistes et démocrates", Parlement européen Roberto Saviano (IT), écrivain Nicolas Schmit (LU), Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration du Luxembourg Gesine Schwan (DE), présidente de la plateforme de gouvernance Humboldt- Viadrina Philippe van Parijs (BE), philosophe, professeur à l’université d’Oxford, l’Université Catholique de Louvain (UCL) et la Katholieke Universiteit Leuven (KUL) et ancien professeur invité à l’Université de Harvard Kirsten van den Hul (NL), écrivaine et éditorialiste David van Reybrouck (BE), écrivain, fondateur du collectif Brussels Poetry et du sommet G1000 (plateforme pour l’innovation démocratique) Petre Roman (RO), ancien Premier ministre de la Roumanie, ancien Président du Sénat Claudia Tapardel (RO), parlementaire européenne, membre de la Commission des affaires constitutionnelles Guy Verhofstadt (BE), ancien premier ministre, président du groupe "ADLE", Parlement européen Guillaume Vicaire (FR), directeur général du groupe d’édition Editis Cédric Villani (FR), mathématicien, Médaille Fields Sasha Waltz (DE), chorégraphe, danseuse et fondatrice de la compagnie de danse Sasha Waltz and Guests

mardi 14 juin 2016

Chômage des chiffres de INSEE


Les cinq chiffres qui dressent le portrait du marché du

Travail 2016 en France




71,5 % 
 
C'est le taux d'activité en 2015, c'est-à-dire les personnes de 15 à 64 ans qui travaillent, recherchent un emploi ou sont disponibles pour en occuper un.
C'est 1,8 point de plus qu'il y a dix ans. «Cette hausse est avant tout portée par les seniors», explique l'Insee.
Sous l'effet des réformes successives qui ont reculé l'âge de départ en retraite, le nombre d'actifs de plus de 50 ans a bondi de 7,6 points pour passer à 64,2%.
Le marché du travail se féminise également.
Le taux d'activité des femmes a progressé de 3,2 points depuis 2005, pour s'établir à 67,6% en 2015.
Celui des hommes stagne mais reste néanmoins supérieur, à 75,5%.


Plus de 1,5 million

C'est le nombre de Français qui souhaitent travailler plus.
Quelque 1,7 millions de personnes (6,6% des actifs occupés) sont en situation de sous-emploi, c'est-à-dire qu'elles sont à temps partiel, souhaiteraient travailler davantage et sont disponibles pour cela.
Les chômeurs souhaiteraient, eux, travailler.
Moins facilement identifiables, les personnes faisant partie du «halo du chômage», ne satisfaisant pas les critères pour être comptabilisées comme au chômage mais souhaitant également travailler.
L'Insee estime que 1,4 millions d'inactifs sont dans cette situation, soit 3,5% de la population.




24%

C'est le taux des actifs 15-24 ans qui sont au chômage.
Les jeunes sont surreprésentés parmi les chômeurs.
Mais les seniors ne sont pas épargnés.
Ce sont eux qui restent le plus longtemps sans emploi: 2,5% des plus de 50 ans sont au chômage depuis au moins deux ans.
Au global, l'année dernière, 2,9 millions de Français étaient au chômage, soit 10% de la population active; un chiffre quasi identique par rapport à 2014 (9,9%).
Premiers touchés: les hommes, «durement affectés» par les hausses successives du chômage après la crise de 2008, dont le taux de chômage a grimpé de 2 points depuis 2011, quatre fois plus que celui des femmes.


5% 
 
C'est le pourcentage de salariés en CDI âgés de moins de 25 ans.
Les jeunes signent de moins en moins de contrats à durée indéterminée.
Le salariat reste la forme d'activité la plus répandue (près de 9 actifs sur 10) et le CDI, le contrat le plus commun (86% des salariés).
Mais ce dernier est en perte de vitesse, accusant un repli de 1,5 points en dix ans.






2,7%
 
C'est la proportion d'agriculteurs dans la population active.
Sans surprise, les plus de 50 ans travaillent plus souvent dans ce secteur que les plus jeunes, davantage attirés par le commerce ou la restauration.
Le secteur tertiaire est toujours le pourvoyeur d'emplois le plus important:
plus de trois travailleurs sur quatre en font partie.
L'industrie arrive deuxième avec 13,9%.





texte de G RUSSELL