Luttons pour un autre euro !
La colère contre l’austérité
monte de partout en Europe, mettant en accusation la faillite morale
des dirigeants qui, en alternance, prônent la soumission aux
exigences des marchés financiers. Le chômage fait rage, frappant de
façon brutale et massive les jeunes.
La souffrance sociale
terrible fait grandir des illusions de fausse radicalité. D’un
côté, comme l’ont confirmé les Grecs eux-mêmes, le refus est
majoritaire de sortir de l’euro. Il ne s’agit pas de rester isolé
face aux marchés financiers et à la spéculation déchaînée.
Mais, d’un autre côté, gronde la protestation contre
l’utilisation qui est faite de l’euro, si favorable à la
domination des marchés financiers et des grandes banques. D’où
les propositions de certains pour sortir de l’euro.
François
Hollande répète que la crise de l’euro est finie.
Il lui est difficile de s’attaquer à son
« ennemi » la finance, et de « défendre
la croissance » d’autant nous sommes en minorité au Conseil qui est aux mains se Capitalo-liberales debridés.Union Européenne, occupe une
place charnière pour transformer la zone euro.
Il se plie devant les
exigences d’Angela Merkel et de la finance allemande, tout en
prétendant servir les intérêts français, que gagnerons nous a ututiliser notre droit de VETO?
Face à ces blocages,
certains agitent l’idée de sortir de l’euro. Cela reviendrait à
fuir devant la lutte décisive pour une autre utilisation de celui-ci
et de la BCE.
C’est une
illusion démagogique et dangereuse, pour cinq grandes raisons.
1 –
Le commerce extérieur de la France souffre d’un déficit annuel de
60 à 70 milliards d’euros. Le retour au franc, qui se ferait
alors au prix d’une dévaluation de l’ordre de 25 % par rapport
à l’euro, entraînerait automatiquement un enchérissement du même
ordre du coût de nos importations.
2 –
Ce ne serait pas très grave, nous dit-on, parce que, grâce à la
dévaluation du franc, nos exportations s’envoleraient. Mais c’est
ne pas voir combien la croissance est durablement lente de partout.
C’est ne pas comprendre à
quel point le surcroît de compétitivité-prix que cela prétendrait
donner aux exportations françaises se ferait surtout au détriment
de nos partenaires d’Europe du Sud, l’Allemagne voyant au
contraire son excédent commercial gonflé par une dévalorisation du
travail des Français qui rendra meilleur marché ses importations en
provenance de son principal partenaire commercial.
Tout cela dans un
contexte de spéculation déchaînée.
Bref, ce serait là le scénario
noir de la surenchère entre dévaluations compétitives et
rétorsions protectionnistes qui ferait s’entre-déchirer les pays
européens.
Ce sont les politiques
d’austérité qu’il faut mettre en cause, avec les luttes pour la
relance d’une croissance de progrès social que permettraient
précisément un autre euro et une autre utilisation de la BCE de
façon solidaire.
3 –
Notre dette publique a été très internationalisée depuis les
années 1980.
elle est détenue à 60 % par
des opérateurs non résidents, banques, sociétés d’assurances,
fonds de pension… Le retour au franc dévalué entraînerait
automatiquement un enchérissement de 25 % sur les quelque
1 140 milliards d’euros de titres de dette détenus hors de
France. Exprimés en francs, les intérêts payés bondiraient, alors
même qu’ils absorbent déjà quelque 50 milliards d’euros par
an !
Par contre, la dévaluation du
franc permettrait à des capitaux étrangers, allemands notamment, de
mettre la main à très bon compte sur nombre de nos atouts
productifs.
4 –
La raison la plus importante, c’est qu’en sortant de l’euro, on
déserterait le terrain de la bataille pour un autre euro et pour une
construction solidaire de l’Union européenne, au mépris d’une
nouvelle croissance fondée sur le développement des peuples et,
notamment, sur l’aide aux pays d’Europe du Sud.
On passerait à côté d’une
opportunité historique pour changer la situation économique et
sociale en France, en Europe et dans le monde.
Une nouvelle politique solidaire
dans l’Union européenne s’appuierait sur la force de la monnaie
que peut créer la BCE.
Alors que chaque pays européen
dispose, isolément, d’un potentiel restreint, la création
monétaire en commun, avec l’euro, offre des potentiels bien plus
importants, car elle est assise sur la capacité de production de
richesses et la créativité de 322 millions de personnes.
Appuyons-nous sur l’échec de
la construction actuelle de l’euro non pour régresser par rapport
aux besoins de changements et de solidarité entre Européens, mais
pour un nouveau type de croissance et de développement.
À partir de la protestation qui
enfle dans tous les peuples de l’Union contre l’austérité, le
pacte de stabilité et le sabordage des services publics, exigeons
que la BCE finance directement un très grand essor des services
publics et de leur coopération en Europe.
Pour cela, chaque pays émettrait
des titres de dette publique rachetés par la BCE. L’argent serait
affecté à un fonds social solidaire et écologique de développement
des services publics européens, géré démocratiquement, qui le
répartirait entre chaque pays proportionnellement à ses besoins.
À partir des luttes pour
l’emploi et les salaires, contre le rationnement du crédit pour
les PME, exigeons que la BCE cesse de refinancer les crédits
accordés aux spéculateurs et aux entreprises qui suppriment des
emplois, précarisent ou délocalisent.
Exigeons qu’elle refinancer
les crédits pour les investissements matériels et de recherche des
entreprises à des taux d’intérêt d’autant plus abaissés,
jusqu’à 0 %, voire en dessous, que ces investissements
programmeraient plus d’emplois et de formations correctement
rémunérés, plus de progrès écologiques.
5 –
Sur le terrain
mondial, si l’on supprime l’euro, il ne resterait plus que le
dollar comme monnaie de réserve internationale.
Son hégémonie en serait
confortée.
La création monétaire du
dollar permet aux États-Unis de financer leur domination économique,
culturelle et militaire.
Elle leur permet aussi de
s’endetter dans leur propre monnaie auprès du reste du monde. La
Chine, la Russie, des pays latino-américains veulent s’émanciper
de cette domination par la promotion d’une monnaie commune mondiale
à partir des droits de tirage spéciaux du FMI, proposition avancée
dans les rangs du PCF et dans le programme du Front de gauche
« l’Humain d’abord ! ».
Mais si l’euro disparaît,
comment peser dans une négociation mondiale en alliance avec les
pays émergents contre le dominateur commun américain ?
On voit donc qu’une autre
utilisation de l’euro peut contribuer, de façon décisive, non
seulement à une autre croissance de progrès social dans l’Union
européenne, mais à un changement fondamental sur le plan monétaire,
économique et social dans le monde.
D'après un texte Paul BOCCARA, Frédéric
BOCCARA, Yves DIMICOLI, Denis DURAND, Jean-Marc DURAND, Catherine
MILLS
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