Je trouve vraiment très drôle, de la part de ceux qui font de
moi un «malade» ( à quoi bon, sinon, le «symptôme»...),
un démagogue, un être vulgaire, bas, un imposteur, un personnage
inconsistant, une personne avide de revanche, un individu ayant
seulement la réputation d’être un philosophe, un amateur de
niaiserie philosophique, un signe de l’effondrement de la pensée,
un compagnon de route de l’antisémitisme, sinon, un antisémite,
de passer pour un homme du ressentiment ! C’est l’hôpital
institutionnel qui se moque de la Charité... Je ne descendrai pas,
pour ma part, aussi bas que ceux qui parlent au nom de «la
communauté philosophique» - une tribu dont je me moque autant
que de ma première tétine... L’attaque ad hominem n’honore pas
ceux qui la pratiquent à défaut de vouloir (sinon de pouvoir...)
débattre vraiment sur les idées.
Le problème est ailleurs. A-t-on le droit, en France,
aujourd’hui, de lire les textes, qu’on nous présente comme
sacrés, avec l’œil du philosophe ? Peut-on, quand on aborde le
Talmud, mais aussi la Bible et le Coran, penser encore
debout ? Ou faut-il d’abord se mettre à genoux ? Ceux qui sont
obligés de se mettre à quatre pour insulter en croyant qu’ils
pensent, défendent l’agenouillement - voilà l’enjeu véritable.
Libre à eux. Nous n’avons effectivement pas les mêmes valeurs. On
peut faire comme si la philosophie des Lumières n’avait pas eu
lieu. Pour ma part, je n’ai pas envie de revenir en deçà du
XVIIIe siècle, à la période scolastique où
l’Inquisiteur tient toute la place ! La génuflexion devant le
papier-bible des légendes monothéistes ou celui des œuvres
complètes de Levinas, Derrida, Blanchot transformés en Père, Fils
et Saint-Esprit de la philosophie n’y fera rien.
Où est mon crime ? Avoir invité à lire Jean Soler, un
auteur qui, depuis un demi-siècle, effectue une lecture des
monothéismes en homme debout ! De la même manière qu’avec le
chevalier de La Barre à qui le pouvoir a coupé le poing et la
langue, qu’on a torturé et décapité, puis brûlé en 1765 avec
un exemplaire du Dictionnaire philosophique de Voltaire
parce qu’il n’avait pas ôté son chapeau au passage d’une
procession, la communauté philosophique autoproclamée envoie
aujourd’hui au bûcher celui qui n’ôte pas son chapeau devant
les processions monothéistes (précisons : processions juives,
chrétiennes et musulmanes, qu’on lise mon Traité d’athéologie
publié en 2005, plutôt que le compte-rendu d’un livre dans un
hebdomadaire).
Quel meilleur bûcher, aujourd’hui, que l’insinuation
d’antisémitisme ? Je dis bien insinuation, car ces
philosophes autoproclamés emblématiques de la communauté écrivent
sous la dictée d’avocats pour éviter le procès en diffamation.
On laisse entendre que... On suppute... On suppose... On appuie le
clin d’œil... De la part de gens qui font carrière dans
l’obscurantisme de la pensée et dans la confusion du style, la
contorsion rhétorique est une seconde nature. Ce vice ajouté à la
plume du procédurier fait merveille dans l’art du corbeau... Voir
ou revoir Clouzot !
Faut-il préciser à cette communauté philosophique réduite à
quatre, que, toute à sa haine, elle oublie que j’effectue un
travail tout simple : celui du philosophe laïc ? Autrement
dit : je revendique le droit de lire les textes fondateurs du
monothéisme comme je lis l’Edda, la Bhagavad-Gîta ou les Lois de
Manou : en philosophe laïc et athée, et non en croyant dévot.
Lire aujourd’hui le Talmud avec un souci herméneutique athée
et laïc vaut d’être traité d’antisémite ;
aborder la Bible avec les outils exégétiques qui furent ceux de
Spinoza (excommunié par les rabbins...), de Richard Simon (persécuté
par les jansénistes, les bénédictins, Bossuet, le pouvoir royal),
de Jean Meslier (puni par la hiérarchie catholique) ou de Prosper
Alfaric (excommunié par le Vatican), déclenche l’insulte
«blasphémateur» ; étudier le Coran avec une méthode
historique fait du lecteur laïc un «islamophobe»... Sale
temps pour la pensée debout !
Je rappelle, pour information, que l’invitation à se relever
pour penser debout date, en France, de 1637, date de parution du
Discours de la méthode de Descartes. J’ajoute que
Heidegger, dans son séminaire de l’été 1933, sous régime nazi
donc, faisait de l’enseignement du philosophe français à
l’université un signe de décadence intellectuelle... Je
précise enfin que la carte de Heidegger au parti nazi avait pour
numéro : 312 589.
Qu’on me permette, pour ma part, de me réclamer de Descartes,
sinon de Voltaire, et non de Heidegger - mais est-ce encore possible
dans ce siècle où le nihilisme n’est pas où l’on croit ? Je
crains que non.
Michel Onfray
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